Par Keith Martin, directeur exécutif, ACIFA.
Pour de nombreux Canadiens, le fait d’être propriétaire d’une résidence est un symbole de stabilité et de réussite. Pourtant, une tendance qui avait passé sous silence jusqu’à maintenant commence à émerger et elle crée un écart important dans la protection financière de bon nombre de familles. Une étude récemment menée par la Life Insurance Marketing and Research Association pour l’Association canadienne des institutions financières en assurance révèle que 80 % des propriétaires canadiens ne sont pas assurés ou sont sous-assurés en ce qui concerne l’assurance de personnes. Ce pourcentage soulève une question cruciale : dans quelle mesure sommes-nous préparés à affronter l’imprévu?
Les répercussions de cette lacune en matière d’assurance pourraient être graves. La vie est remplie de fâcheux hasards : une maladie soudaine, un accident ou même la perte d’un membre de la famille qui contribue au revenu du ménage. Sans protection adéquate, ces situations peuvent entraîner des difficultés financières qui compromettent la stabilité de la famille. La gestion des paiements hypothécaires, le maintien du niveau de vie ou la simple capacité à garder la tête hors de l’eau deviennent rapidement difficiles.
L’assurance protection de crédit (APC) est une option intéressante pour aider les propriétaires à gérer les risques financiers associés à leur hypothèque. Habituellement offerte par les prêteurs au moment d’accorder une hypothèque ou un prêt, l’APC peut réduire ou rembourser le solde dans l’éventualité d’un décès, d’une maladie grave ou d’une invalidité et, dans certains cas, peut couvrir les paiements si une perte d’emploi survient. Bien que ce ne soit pas la seule option d’assurance offerte, l’accessibilité de l’APC au moment d’obtenir une hypothèque en fait un excellent choix pour bon nombre de personnes.
Prenons par exemple une famille canadienne ayant une hypothèque de 300 000 $. Si le soutien économique principal du ménage décède subitement et qu’il n’est pas adéquatement assuré, les membres survivants de la famille pourraient devoir utiliser leurs économies pour faire les paiements hypothécaires mensuels. Ou encore pire : ils pourraient risquer de perdre la maison s’ils n’ont pas suffisamment d’argent pour payer leurs dettes.
En revanche, si la même famille a une APC sur leur hypothèque pour le soutien économique principal du ménage, l’APC pourrait réduire ou rembourser le solde hypothécaire si un événement assuré (comme le décès de l’emprunteur assuré) survient. Ainsi, les membres survivants de la famille pourraient maintenir leur niveau de vie et possiblement éviter les conséquences associées au fait d’être sous-assurés ou non assurés.
L’APC se démarque par sa simplicité et son accessibilité. Offerte directement au moment d’obtenir une hypothèque, l’APC est une option pratique et opportune pour les propriétaires qui veulent protéger leur avenir financier. Bien que l’APC ne soit pas la seule forme d’assurance possible, son accessibilité en fait un choix idéal pour de nombreuses familles.
L’APC joue un rôle important dans l’éventail des options en matière d’assurance, particulièrement les propriétaires à faible revenu (qui sont disproportionnellement touchés). Près de la moitié des propriétaires ne sont pas assurés et parmi ceux qui le sont, 75 % sont sous-assurés puisque leur police couvre moins de sept à dix fois leur revenu selon l’Agence de la consommation en matière financière du Canada. Dans notre étude, nous avons interrogé 1 175 propriétaires canadiens se situant dans diverses tranches de revenus. Nous avons découvert des disparités importantes dans les couvertures. Bien que 55 % des propriétaires ayant une hypothèque, une marge de crédit hypothécaire ou les deux aient souscrit à une APC, les propriétaires à faible revenu possèdent beaucoup moins de produits d’APC.
L’écart met en lumière la possibilité de sensibiliser les propriétaires aux avantages de l’APC et le rôle qu’elle joue dans le plan financier d’une famille pour assurer sa sécurité financière. L’acquisition de connaissances financières est un élément essentiel pour combler cet écart. Le sondage a permis de découvrir que ces propriétaires, particulièrement ceux qui se trouvent dans les tranches de faible revenu, hésitent à demander des conseils financiers. En effet, environ 38 % des répondants ont indiqué qu’ils n’avaient jamais consulté ou ne voulaient pas consulter un professionnel du milieu financier. Cette hésitation souligne l’importance de créer des ressources simples et faciles d’accès qui permettent aux gens afin qu’ils puissent prendre des décisions éclairées au sujet de leur avenir financier.
Les attitudes et les préoccupations financières sont un autre aspect pertinent de la recherche. Parmi les propriétaires à faible revenu, 48 % ont indiqué être peu ou pas du tout informés en matière de finances, et 53 % sont principalement préoccupés par le paiement des factures mensuelles, alors que 44 % s’inquiètent de ne pas avoir suffisamment d’argent pour bien vivre à leur retraite.
Dans son budget de 2024, le gouvernement a mis l’accent sur l’inclusion financière, ce qui est cohérent avec les conclusions de notre étude. C’est donc le moment idéal pour les institutions financières, les fournisseurs d’assurance et les décideurs politiques de collaborer afin de combler l’écart en matière d’assurance en faisant ce qui suit :
- Sensibiliser la population sur l’importance de la protection financière et des options offertes.
- Offrir des programmes éducatifs adaptés et de l’information aux communautés mal desservies.
- Créer des produits d’assurance inclusifs et flexibles qui répondent aux besoins des ménages.Â
Par exemple, des processus de demande simplifiés et des options de paiement flexibles afin de rendre l’assurance plus accessible aux marchés mal desservis. Une réglementation gouvernementale efficace et efficiente peut jouer un rôle important dans la protection des propriétaires, en veillant à ce qu’ils aient accès à une couverture adéquate. Ultimement, la question ne peut pas être réglée avec une seule solution. Que ce soit avec l’APC ou une autre forme d’assurance, ce qui importe est que les propriétaires canadiens aient les outils et les connaissances nécessaires pour protéger leur famille et leur avenir. En favorisant une bonne compréhension des options offertes et en éliminant les barrières en matière d’accès, nous pouvons combler l’écart considérable dans la sécurité financière.
Essentiellement, la discussion sur l’assurance est une discussion sur la résilience. En cette période d’incertitude, il est primordial de s’assurer que les propriétaires ont accès à plusieurs options d’assurance, et ce n’est pas qu’une simple question de stabilité financière : il s’agit d’offrir la tranquillité d’esprit et la capacité de traverser les tempêtes imprévues.